Vincent Brévart

Vincent Brévart

Maladie de Huntington English

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Mes symptômes d'aujourd'hui

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Mes symptômes en cas de retard de traitement

C'est donc fin 2009 que j'ai commencé à prendre de l'acide folique à haute dose, et je n'ai pas arrêté depuis. J'aurais dû conduire des expériences consistant à interrompre le traitement pour savoir si mes mouvements involontaires revenaient alors. Mais d'une part je n'avais pas trop envie de laisser exprès mon cerveau dégénérer, et d'autre part c'eut été des expériences sans aucune valeur, puisque conduites sans contrôle médical. Et puis je voulais d'abord vérifier que le traitement était efficace sur le long terme, et que je supportais bien les hautes doses d'acide folique. D'après mes lectures, le surdosage de cette vitamine n'était pas dangereux. Mais je n'en étais pas certain.

Deux ans après, en 2011, j'allais toujours très bien. Je suis passé progressivement à un comprimé toutes les deux heures, parce que je trouvais que c'était plus prudent pour le cas où l'effet des comprimés à 5 mg ne durait pas aussi longtemps que prévu. Et pour la nuit, c'était plus pratique pour moi car je supporte très bien le réveil toutes les deux heures. Je trouve même cela très agréable. Cela me permet d'aller aux toilettes, de vérifier la température de ma chambre, de boire un peu et souvent de sortir d'un rêve en boucle dont je ne parvenais pas à me dépêtrer. Je profite aussi beaucoup plus de mes rêves, qui en étant parfois interrompus, laissent des souvenirs cocasses et des impressions amusantes. Et je me rendors ensuite très facilement, ce qui est sans conteste un gros avantage.

 
Si je n'ai pas fait l'expérience d'arrêter volontairement mon traitement, cela s'est fait un peu tout seul, sous la forme de retards de prise de comprimé. Même en m'organisant bien avec un réveil qui sonne ou qui vibre à l'heure demandée, il y a eu forcément des ratés, des oublis de programmer le réveil, ou même la nuit, un réveil bien effectué, un petit verre d'eau avec une goutte de sirop, et hop !... j'oublie le comprimé ! C'était bien la peine de se réveiller en pleine nuit... Ces retards de prise (d'environ 2 heures en général) ont presque toujours généré une recrudescence des petits mouvements dans les deux semaines qui ont suivi. Ce sont des petits mouvements de pied, très légers, des rétractations de main à peine sensibles, ou un index qui se lève tout seul. Au moment de l'endormissement, il y a aussi clairement davantage de petits mouvements de bras ou de jambes, parfois une piqûre sans mouvement.
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Filmer mes symptômes

Au début 2013, un retard en cours de journée m'a curieusement été signalé par un tressautement de paupière. Je me suis dit : Tiens, qu'est-ce qui passe, ai-je bien pris tous mes comprimés ? En comptant alors mes comprimés du jour et en voyant la sonnerie de mon réveil réglée sur le début d'après-midi, je me suis rendu compte que j'avais un retard de 4 heures. Rien ne s'est produit le jour même (à part ma paupière qui tressautait toujours), mais dans la semaine suivante, mes deux index se sont mis à bouger ensemble, moins fortement qu'en 2009, mais bien nettement quand même, et plusieurs fois de suite, avec des épisodes de trente secondes environ. C'est seulement trois semaines plus tard, quand ces mouvements avaient presque disparu, que je me suis exclamé : Mais quel imbécile, j'aurais dû les filmer !

Ma paupière, elle, a tressauté pendant 2 mois, une vingtaine de fois par jour. Je pouvais même la faire tressauter volontairement, en prenant une grande inspiration ou en baillant. Mais cela n'avait peut-être rien à voir avec les autres mouvements.

Du coup, l'idée de filmer mes symptômes a germé dans mon esprit, et pendant les mois qui ont suivi, je me suis préparé à faire mon premier reportage médical. J'ai tâtonné un peu pour apprendre à filmer avec mon appareil photo, pour trouver le bon cadrage et la bonne lumière (enfin, quelque chose d'acceptable), et je me suis entraîné à filmer ma main immobile. Au mois d'Avril, j'étais prêt. Mais comme pour un reportage animalier, il faut de la patience. Car ce n'est qu'en Septembre, à la suite d'un nouveau retard de prise de comprimé, que ma main droite a bien voulu sortir du bois. Oh, ce ne fut pas facile ! Car les mouvements étaient très courts. Le temps de les voir arriver, de vérifier qu'ils étaient suffisamment forts pour être filmés, de courir à l'endroit requis, d'allumer l'appareil photo et de démarrer l'enregistrement, paf, c'était fini. Ou juste en train de se terminer. Enfin, après plusieurs tentatives manquées, j'ai malgré tout réussi à enregistrer la petite vidéo ci-dessous, où l'on voit assez bien la zone excitée nerveusement qui finit par tirer sur l'index. C'est beaucoup moins fort que ce j'ai connu en 2009, mais c'est quand même visible et surtout difficile à simuler. Essayez vous-même. Moi, je n'arrive pas à faire volontairement la même chose.

Vidéo 2013

Cliquez sur l'image pour lancer la vidéo au format Windows (wmv).
Si cela ne marche pas, essayez cet autre format : format m4v.

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Comment mon cerveau semble se rétablir

Lorsqu'à la suite d'un retard de prise de comprimé j'ai un épisode de mouvements de main comme celui de la vidéo ci-dessus, il dure environ quatre semaines. Une main ou l'autre peut être touchée (rarement les deux en même temps), et si le mouvement touche plus fréquemment l'index, il concerne parfois aussi le majeur ou le pouce. Jamais plusieurs doigts en même temps, et quand le majeur est touché, la zone activée est nettement le dessus de la main, et non plus l'espace entre le pouce et l'index. Le tremblement apparaît plusieurs fois dans la semaine, le matin ou l'après-midi (parfois la nuit, mais rarement). Je peux être en train de faire la vaisselle et sentir soudain mon doigt bouger pendant quelques secondes. Cela revient plusieurs fois pendant une demi-heure environ, et cela disparaît ensuite.

Au fur et à mesure que le temps passe, le mouvement s'affaiblit. C'est toujours le même doigt de la même main qui est concerné, mais le doigt bouge de moins en moins. La dernière semaine, je peux juste sentir la zone en question trembler pendant quelques instants, mais le doigt, lui, ne bouge plus. Et ce qui est encourageant, c'est qu'une fois l'épisode terminé, je peux rester plusieurs mois sans aucune alerte du même type. C'est comme si mon cerveau avait réussi à éliminer la dégradation qui générait le symptôme. D'après ce que je ressens, l'acide folique n'agit pas directement sur mes symptômes. Elle empêche que ne se produisent des dégradations qui causeraient ensuite, après parfois plusieurs jours, les différents symptômes ressentis.

On peut donc comprendre ma réticence à l'idée d'arrêter brutalement mon traitement pendant ne serait-ce que 48 heures. Car si un retard de 4 heures produit chez moi des effets déplaisants pendant environ un mois, on peut fort bien imaginer qu'un retard de deux jours engendrerait des problèmes pouvant durer douze fois plus longtemps, soit une année entière ! Un an de séquelles, dont certaines ne seraient peut-être pas réversibles. Je n'en sais rien. Il peut y avoir des seuils au-delà desquels certains dégâts neurologiques ne seront plus récupérables. Il peut aussi y avoir des dysfonctionnements en cascade, dont certains seront peut-être irrémédiables.

Maintenant, faisons une supposition. Supposons que l'acide folique bloque effectivement la progression de la maladie, que je n'en aie jamais pris sous forme de médicaments, et que mon cerveau soit aujourd'hui très dégradé. Quels effets sur mon état pourrait alors avoir la prise de fortes doses d'acide folique ? En toute logique, aucun ! Aucun effet visible, en tout cas. Les dégradations seraient toujours là, donc les symptômes aussi, et ce ne serait pas le fait d'éventuellement stopper l'évolution très lente de cette maladie qui pourrait changer quoi que ce soit dans mon état du moment.

C'est pourquoi je soutiens les chercheurs dans leur quête d'un traitement pour réduire les symptômes des malades gravement atteints. Il faut pouvoir aider ces derniers à récupérer au moins une partie de leurs capacités cognitives, et leur permettre d'avoir une fin de vie digne de ce nom. Mais je ne peux m'empêcher d'encourager aussi les médecins à chercher un traitement qui s'attaque à la cause des dégradations infligées par la maladie, et non pas seulement aux symptômes qui en découlent. D'après mes observations, on doit pouvoir agir avant que les dégradations n'aient lieu. Bien sûr, je ne suis pas sûr de mes analyses, et toutes mes affirmations demandent à être vérifiées. Mais je suis convaincu qu'il ne faut pas négliger la piste de traitement préventif que semble révéler mon cas personnel.

Ce ne sera pas facile. D'autant plus qu'il pourrait y avoir des facteurs aggravants.

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Les facteurs aggravants